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Défiscalisation : Patrice Vergriete veut stopper la dépendance

Depuis plusieurs décennies, la production de logements a pu se faire grâce à de nombreux dispositifs fiscaux (Besson, Robien, Scellier…) qui ont permis aux ménages de s’intéresser à l’immobilier. Mais pour Patrice Vergriete (Logement), ces mesures incitatives n’ont pas eu que des vertus puisqu’il estime que les prix ont ainsi pu être dopés et que les constructions n’ont pas toujours été satisfaisantes. Il se montre clairement opposé à ce que la défiscalisation immobilière puisse encore durer dans le temps.

Patrice Vergriete a beau être le ministre délégué au Logement, il ne sera certainement pas celui de la défiscalisation immobilière. Les dispositifs Pinel & Pinel Plus, qui sont les plus connus du grand public actuellement, ne devraient pas être reconduits au-delà de 2024. Pour l’ancien maire de Dunkerque (Nord), ces avantages défiscalisants sont de purs montages financiers qui ont permis pendant des années de faire grimper les prix de l’immobilier et d’enrichir, essentiellement, les conseillers en gestion de patrimoine et les promoteurs immobiliers. Il leur reproche d’avoir démarché, avec la bienveillance des banques, une clientèle de particuliers pour les inviter à investir dans l’immobilier locatif et à défiscaliser alors qu’ils n’y avaient jamais pensé auparavant. Pour lui, ils n’ont jamais vraiment eu l’intention de s’intéresser à un logement mais d’être attirés par le montage fiscal qui leur a été mis en avant. Il en veut pour preuve que l’argumentaire était tellement bien rodé et efficace que de nombreux ménages ont eu recours à ces solutions sans même se rendre sur place pour voir ce qu’ils achetaient. Face à cet engouement commercial, les promoteurs ont multiplié les opérations dans des villes périphériques, là où le foncier est disponible et abordable, tout en standardisant au maximum leurs constructions (quitte parfois même à réaliser des économies sur les coûts des matières premières). Ces programmes, aux critères médiocres (malgré la multiplication de normes), ont surtout été occupés par des locataires et les logements se sont dégradés dans le temps. Face à ce constat et dans un climat très compliqué pour les promoteurs, Patrice Vergriete admet qu’il ne peut pas stopper la défiscalisation du jour au lendemain car la production de logements ne peut pas s’arrêter et que les besoins dans certaines régions restent évidents. Mais il estime que ces mesures fiscales ne devraient plus être d’actualité…

Nous n’avons pas le choix. Continuer, c’est prolonger la dépendance. Pire, on l’aggrave, car il faudrait monter encore d’un cran la défiscalisation pour re-solvabiliser les acheteurs, dans le contexte actuel, alors que les prix du foncier doivent baisser. L’immobilier est dopé. Il doit arrêter la drogue fiscale“, a fait savoir Patrice Vergriete, le ministre en charge du Logement, dans un entretien accordé au Point. S’il ne souhaite pas que les ménages bénéficient de défiscalisations immobilières, il compte s’orienter vers les institutionnels pour redynamiser le marché, comme cela a pu être mis en place ces dernières semaines avec des ventes en bloc massives (Action Logement, Caisse des Dépôts & Consignations…). Dernièrement, le député François Jolivet (Horizons) s’est montré inquiet concernant les mesures budgétaires en faveur du logement neuf et craint une catastrophe en 2024. En 2022, le logement représentait 97 milliards d’euros de recettes fiscales tandis que la Cour des Comptes notait que la politique en faveur du logement représentait un coût de 40 milliards d’euros.